DECEMBRE AU BENIN
Docteur Frédéric Chagué
Bulletin 7
Début décembre, nous avons retrouvé le
Bénin en pleine effervescence. Dieu merci, il ne s’agissait
pas de ces terribles débordements belliqueux que connaissent malheureusement
certains pays d’Afrique mais de la campagne électorale en
vue des toutes prochaines municipales. C’est dans cette ambiance
bruyamment bigarrée que nous avons travaillé : d’abord à Adjohoun
pour la mise au point d’un centre de soins chez notre amie Mariette
puis dans « nos» deux villages, Illikimou et Asrossa.
L’Afrique
est terre de surprises :
Notre arrivée à Illikimou a d’autant plus ravi les villageois
que nous n’étions pas annoncés . Probablement la trypanosomiase
(maladie parasitaire véhiculée par la mouche tsé-tsé)
a-t-elle endormi l’araignée responsable de cette partie du web … Même
si notre travail a été gêné par l’absence
de préparation in loco, nous avons pu à nouveau apprécier
l’assiduité de Joseph, le Major (infirmier responsable) et de
Raoul, le Gérant. Grâce à eux, le centre de santé a
pu maintenir une certaine activité et a vu naître une mutualisation
balbutiante dont le premier essor devrait être dynamisé par la
prochaine visite des responsables de l’Association pour le Développement
des Mutualités Agricoles au Bénin (cf. bulletin n° 5).
L’Afrique est terre de contraste : à Assrossa, nous avons trouvé une équipe
autocritique, qui cherche en son sein propre les raisons d’un (léger)
recul d’adhésion à la mutuelle, des responsables qui s’organisent
pour faire face à la démission de la sage-femme et un major prénommé Innocent
qui sacrifie son propre confort au profit du développement du Centre.
L’Afrique est aussi terre de surnaturel : un soir nous avons attendu
en vain le major qui était parti à Cotonou. A la nuit tombée,
nous sommes allés déguster une Béninoise (bière
locale) à la buvette chez André ; en rentrant, alors qu’il
n’y avait aucun bruit dans le village (fait totalement inhabituel) et
qu’il n’y avait personne d’autre sur la piste que nous (les
deux yovohs = blancs), nous avons dans un bruissement de feuillages croisé le
Zangbeto, la police du vaudou. Nous avons dormi et à notre réveil,
tu n‘étais pas là, Innocent, et nous t’attendions
pour opérer une enfant. Nous nous apprêtions (réflexion
faite, nous t’avons maudit) à te maudire lorsque d’un coup
de guidon magique, tu es apparu, aux commandes de ta zukéké (machine à feu
= cyclomoteur), le cabas entre les jambes et la face derrière un masque à gaz
digne d’un poilu de Verdun. Trois heures auparavant, tu dénichais
enfin un engin à Cotonou et tu affrontais la pluie puis la poussière
de la piste pour arriver, rutilant de latérite, en pleine hypoglycémie.
|